Le juge administratif face au fait de l’islam

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L’idée de travailler sur le sujet du « juge administratif face au fait de l’islam » est née d’une prise en conscience de la litigiosité croissante liée à la présence de l’islam en France. Cette question est assez complexe. Elle a le mérite de clarifier l’articulation de la norme républicaineainsi que son application par les acteurs principaux, à savoir le juge,avec la réalité mouvante de l’islam. Certes, la conviction religieuse est, par essence,confinée dans le for intérieur de chaque individu. Mais, en raison de la volonté de plus en plus forte d’extériorisation des choix religieux, la conviction quitte son domaine propre et cesse d’être une affaire personnelle. L’islam, étant un fait complexe, revêt ces deux dimensions : spirituelle et temporelle. Face à cette complexité, le juge se trouve sollicité de toute part pour résoudre les contentieux marqués du sceau de la religiosité. Le jugejudiciaire n’a, pour sa part, pas hésité à montrer son sentiment de réticence ou, à tout le moins, de faible maîtrise envers ces contentieux. Néanmoins, Le juge administratif semble se montrer beaucoup plus audacieux. Dans l’accomplissement de sa mission infiniment délicate, le juge a dépassé l’obéissance des normes pour mettre en pratique “l’art de juger”. L’intervention du juge pour remédier aux conflits liés à la question religieuse s’avère chargée de réflexes philosophiques et morales. En outre, la sensibilité de la matière pousse le juge non seulement à prendre, avec beaucoup de prudence, une décision de justice mais aussi à s’intéresser aux conséquences éventuelles de sa décision. Or, malgré la démarche prudentielle poursuivie par le juge administratif, notamment par le Conseil d’Etat, dans la plupart de ses décisions, sa jurisprudence continue à subir un traitement médiatique effervescent. L’affaire dite du « foulard de Creil » a été le point de départ d’un discours, médiatique et politique interminable sur l’islam,miné par des concepts imprécis voire incompréhensibles.