Recherche sur le principe de distinction en droit musulman, d’après l’étude de l’école classique hanafite

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Le droit musulman autorise-t-il l’attaque des civils en temps de guerre? Cette question justifie à elle seule notre essai. La recherche d’une réponse prend la forme d’une nécessité au regard de l’actualité internationale : de nombreux terroristes, se revendiquant musulmans, ciblent les civils dans leur « guerre contre l’Occident », à travers des attentats meurtriers ; les populations civiles sont largement ciblées par les combattants musulmans dans les zones de conflits du Moyen-Orient. Dès lors, faudrait-il croire que le droit musulman autorise – et même encourage – le ciblage de civils ? Il suffit d’étudier brièvement le droit musulman pour comprendre qu’entre sa substance et son application, les divergences peuvent être immenses. Notamment quand il s’agit d’applications radicales de la Sharia. Aussi, il nous est apparu nécessaire de dépasser la simple information journalistique pour proposer une étude juridique sur un sujet qui, pour comprendre au mieux l’actualité, apparaît essentiel. Traduit en termes plus juridiques, notre étude s’articule autour de l’éventuelle existence, en droit musulman, d’un principe de distinction. Le principe de distinction est un principe fondé sur l’idée selon laquelle « le seul but légitime que les Etats doivent se proposer, durant la guerre, est l’affaiblissement des forces militaires de l’ennemi ». Il implique l’interdiction de viser directement les personnes civiles, les non-combattants, pendant les conflits armés, et est à l’origine de l’interdiction des attaques non-discriminées, qui touchent militaires et civils sans distinction. Ce principe, l’un des principes fondateurs du droit international humanitaire (DIH) est notamment consacré dans l’article 3 commun aux Conventions de Genève, s’appliquant aux conflits non internationaux, et dans l’article 32 de la Convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre, s’appliquant dans les conflits internationaux. Surtout, il est réaffirmé, pour les conflits internationaux et non internationaux, par les deux Protocoles additionnels aux Conventions de Genève. Le but de cet essai n’est pas de disserter sur le principe de distinction du DIH. Cependant, ce principe, tel que défini dans les textes internationaux contemporains, va nous servir de point de départ et de point de comparaison. Pour répondre à notre question première, il faudra se demander si un principe de distinction existe en droit musulman, et s’il est suffisamment proche du standard international pour assurer une protection efficace des civils. Il convient, ici, d’expliciter notre méthode de recherche, et les limites de notre étude.