Tunisie : Révolution du droit et « Révolution par le droit »
Article By : Nidhal Mekki
La révolution est en général une rupture plus ou moins radicale avec les ordres politiques, juridiques, économiques et sociaux en place en vue d’en instaurer de nouveaux. En ce qui concerne le droit, la révolution abroge le droit antérieur ou du moins les principales normes de cet ordre (notamment la constitution) pour jeter les bases d’un nouveau système juridique qui évidemment reflète un nouveau contrat politique et social. Avant d’avancer dans l’examen de l’expérience tunisienne, un bref rappel historique s’impose concernant l’histoire constitutionnelle du pays. Il faut dire que la Tunisie se caractérise par une histoire constitutionnelle assez ancienne et riche par rapport à ses voisins de la région . Déjà les Carthaginois, avant même le début de notre ère, avaient une constitution qui a été décrite par Aristote comme étant une constitution très équilibrée et dénotant une grande sagesse. Les Amazighes, les Carthaginois, les Romains, les Byzantins et les différentes dynasties arabo-musulmanes ont tous contribué à créer un Etat tunisien et par conséquent des institutions et une administration assez organisée ce qui favorise l’apparition de traditions constitutionnelles. En 1857, il y a eu le Pacte fondamental qui consistait en un ensemble de droits reconnus et octroyés par le Roi de Tunis (Bey) à ses « sujets » quelle que soit leur religion ou confession. En 1861, ce fut la première constitution écrite du monde arabe, même si elle a été suspendue trois ans après, à cause d’une révolte populaire. Durant la colonisation française, le mouvement national s’est construit notamment autour de l’idée d’une constitution pour la Tunisie au point que le parti qui a mené la lutte pour l’indépendance s’appelait « Parti destourien libre » (littéralement : parti constitutionnel libre). Une constitution ainsi qu’un Parlement pour la Tunisie étaient au cœur des revendications du mouvement national : encore un indice de l’enracinement de l’idée de constitution et d’institutions en Tunisie.