La protection des droits environnementaux face aux crises hydriques : Une analyse comparée des approches juridiques africaines et européennes à la lumière de la jurisprudence des cours régionales des droits de l’homme

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La crise hydrique n’est pas une nouvelle problématique, elle existe depuis des décennies. Toutefois, cette crise s’est aggravée de plus en plus ces dernières années. L’accès à l’eau est devenu un défi majeur pour toute l’humanité surtout face aux problèmes liés à la pollution, les changements climatiques et au besoin croissant de sources d’eau partout dans le monde. En effet, l’eau, une composante déterminante pour une vie digne et un environnement sain, demeure toujours rare voire introuvable.
D’ailleurs et selon la résolution de l’Assemblée générale des Nations unies adoptée le 28 juillet 2010 : “environ 884 millions de personnes n’ont pas accès à l’eau potable et…plus de 2,6 milliards de personnes n’ont pas accès à des services d’assainissement de base…relevant avec inquiétude que près de 1,5 million d’enfants âgés de moins de 5 ans meurent et 443 millions de jours d’école sont perdus chaque année du fait de maladies d’origine hydrique ou liées à l’absence de services d’assainissement ”. En Afrique, la situation demeure de plus en plus grave. En effet, “en 2015, en Afrique subsaharienne, seuls 24 % de la population avaient accès à l’eau potable, tandis que seuls 28 % disposaient d’installations sanitaires de base qui n’étaient pas partagées avec d’autres ménages” . Face à cette situation qui ne cesse de s’aggraver, les systèmes juridiques régionaux se trouvent face à un combat acharné pour la reconnaissance de ces nouveaux droit fondamentaux.
Dans cette perspective, la consécration des textes juridiques au niveau national et régional afin de garantir la justice sociale et environnementale, est accompagner par la création d’institutions diversifiées qui tendent vers la même finalité, et qui ont pour objectif de concrétiser ces normes juridiques. Entre autres, on trouve les juridictions régionales qui contribuent manifestement à la structuration et au renforcement des droits sociaux et environnementaux au niveau régional, mais aussi interne.
De surcroit, que ce soit, la Cour africaine des droits de l’Homme et des peuples (ci-après CADHP) ou la Cour européenne des droits de l’Homme (ci-après CEDH), ces juridictions sont tenues de réaliser avec tout les moyens possibles la justice sociale et environnementale à travers la garantie des droits humains comme le droit à l’eau. D’ailleurs l’absence d’un texte clair qui consacre les droits environnementaux en tant que catégorie spécifique de droits, ne semble pas être un obstacle devant ces juridictions pour reconnaitre l’existence de ces derniers, même si leurs approches semblent parfois divergentes. En effet, tandis que la CADHP consacre une approche qui se focalise sur la communauté ou le groupe jouissant du droit, la Cour européenne adopte une approche individualiste qui se concentre sur le bien de l’individu et sa vie privée.
Ceci nous amène à poser la question suivante : En abordant la problématique de la crise hydrique, comment la CADHP et la CEDH ont pu consacrer le droit à l’eau en tant que droit environnemental ? Et dans quelle mesure peut-on considérer ces deux juridictions cohérentes dans leur consécration des droits environnementaux ?
L’analyse des deux jurisprudences différentes dans leur interprétation des droits fondamentaux clarifie comment ces instruments ont pu adapter les normes existantes pour répondre aux nouveaux besoins des communautés humaines.
Cette étude s’articule autour de deux axes principaux, à savoir : l’originalité des approches des juridictions régionales dans la reconnaissance progressive du droit à l’eau dans un premier lieu, et l’harmonisation relative des approches de ces juridictions, dans un deuxième lieu.