La responsabilité des États pour dommages climatiques en droit international de l’investissement

Article By :

Introduction
Le changement climatique représente un risque majeur pour les investisseurs étrangers et constitue un défi à relever en termes de tensions, contestations, inégalités et inévitablement des litiges résultant de l’insuffisance des mesures de lutte contre les dommages climatiques ainsi que l’inefficacité des mesures destinées à la protection du climat . En effet, personne ne doute que l’investissement a un rôle crucial dans la lutte contre les changements climatiques, susceptibles de mettre en péril la situation financière et économique des Etats d’accueil de l’investissement.

On peut rappeler dans ce cadre les dispositions de l’article premier de la loi n° 2019-47 du 29 mai 2019 relative à l’amélioration du climat de l’investissement prévoyant que : « Les dispositions de la présente loi ont pour objectif de promouvoir l’investissement et d’améliorer le climat des affaires par la simplification des procédures requises pour la création d’entreprises économiques, la facilitation de leurs modes de financement et le renforcement de la gouvernance et de la transparence des sociétés ». Toutefois, la prise en considération du phénomène climatique par le droit des investissements est devenue de plus en plus importante, ce qui a généré certaines interactions entre le droit de l’investissement et la lutte contre les changements climatiques.

Ces interactions complexes, dynamiques et évolutives ont amené les tribunaux arbitraux à examiner les réformes actuelles en droit international en général et en droit de l’investissement en particulier, tout en accordant une importance et un traitement spécifique aux considérations climatiques. Par ailleurs, le rôle du droit climatique dans l’arbitrage des investissements est désormais une question problématique susceptible de mettre en jeu la responsabilité internationale des Etats d’accueil de l’investissement pour dommages climatiques . Aucun Etat n’est à l’abri d’un contentieux impliquant des plaintes exercées à son encontre par les investisseurs étrangers, victimes des dommages climatiques.

A ce stade, on peut poser la question suivante : est-ce que la responsabilité internationale des États pour dommages climatiques peut être engagée en droit international de l’investissement ?
Une réponse pertinente à cette question doit de toute évidence passer par l’examen des conditions d’engagement de la responsabilité internationale de l’Etat d’accueil en cas de manquement de ce dernier à ses obligations internationales dans un premier lieu (I) et par l’étude de la spécificité de la mise en jeu de la responsabilité internationale de l’Etat hôte de l’investissement pour dommages climatiques dans un second lieu (II).

I- Les conditions d’engagement de la responsabilité de l’Etat

La responsabilité d’un Etat peut être engagée pour manquement à ses obligations de prendre les mesures nécessaires pour éviter de causer des dommages à l’environnement des autres Etats.
Au sens large du terme, la responsabilité est définie comme étant : « la charge assumée par un sujet de droit ou un organe d’une organisation consistant à régler un problème ou gérer une situation ». Au sens du droit international, la responsabilité des Etats désigne : « la sanction de droit commun du non-respect de leurs obligations internationales » .
Il s’agit de la violation d’une obligation internationale (A) portant atteinte aux droits et aux intérêts de l’investisseur étranger et susceptible de réparation (B).

A- La violation d’une obligation internationale

L’engagement de la responsabilité internationale découle nécessairement de la violation d’une obligation internationale. Une telle violation ne peut être établie que si elle a été commise par un sujet de droit international, en l’occurrence l’Etat. En outre, il est largement admis en doctrine et dans la pratique jurisprudentielle qu’un acte juridictionnel peut constituer une violation du droit international puisque les comportements des juridictions internes peuvent engager, le cas échéant, la responsabilité internationale de l’Etat.
En droit international de l’investissement, la violation d’une obligation du droit international d’une part et l’atteinte aux droits de l’investisseur étranger d’autre part, constituent les conditions d’engagement de la responsabilité internationale de l’Etat d’accueil pour dommages climatiques. Conformément aux dispositions du Projet d’articles de la Commission de droit international (C.D.I ) la règle de la responsabilité internationale s’applique à partir du moment où la violation d’une obligation internationale est établie. Les conséquences d’une telle violation varient selon que le fait internationalement illicite a ou non causé un dommage d’un côté et en fonction de la nature de la norme violée de l’autre côté. Ainsi, le dommage subi par l’investisseur étranger doit être la conséquence directe de la violation établie.
Néanmoins, en matière de droit climatique, l’obligation violée, comme elle peut être recherchée dans le droit spécial des changements climatiques, elle peut l’être aussi en droit international général.
Néanmoins, dans le cadre de la responsabilité internationale des Etats, il ne s’agit pas de faute subjective mais plutôt d’un fait illicite générateur de responsabilité. Ce fait illicite ne peut être générateur de responsabilité susceptible de réparation (a) que s’il est en étroite relation avec le dommage causé (b).